Le monde du sport aime les débats éternels. Qui est le plus grand de tous les temps ? Dans l’univers du hockey sur glace, un nom revient sans cesse : Wayne Gretzky. Pourtant, ce dimanche, un autre géant est entré dans la légende. Avec son 895e but en carrière, Alex Ovechkin des Washington Capitals a surpassé « The Great One » pour devenir le meilleur buteur de l’histoire de la LNH.

Lorsque Gretzky a raccroché les patins à l’issue de la saison 1998-1999 avec les Rangers de New York, peu de gens croyaient que son record serait un jour battu. Aujourd’hui, après avoir vu Ovechkin accomplir cet exploit, une question se pose : ce record était-il le dernier véritablement « intouchable » que l’on verra tomber de notre vivant ?

Dans d’autres disciplines, certains sommets semblent tout aussi inaccessibles. Barry Bonds et ses 762 coups de circuit en baseball, ou pour ceux qui rejettent les performances entachées de dopage, les 755 de Hank Aaron. En basket, LeBron James continue d’ajouter à son impressionnant total de points. En football américain, Tom Brady trône avec 649 passes de touchdown et plus de 89 000 verges à la passe.

Mais ce que vient de réaliser Ovechkin semble appartenir à une autre dimension. Son exploit n’est pas uniquement une affaire de chiffres, mais aussi de contexte et de constance.

L’ombre du dopage plane toujours sur le palmarès de Bonds. Les exploits de Brady se sont inscrits dans une époque où la protection des quarts-arrière a radicalement changé la donne, rendant la position moins exposée physiquement. Même chose pour LeBron James, qui continue de dominer dans une NBA plus permissive sur le plan physique. Les règles ont évolué, facilitant les carrières longues et les performances individuelles exceptionnelles.

Ovechkin, lui, évolue dans un environnement bien plus hostile au buteur que celui de Gretzky. Le nombre de buts marqués par match a chuté, les gardiens sont aujourd’hui mieux protégés, mieux entraînés et mieux équipés, avec des jambières plus larges et des techniques plus avancées. Et contrairement à Gretzky, entouré de futurs membres du Temple de la renommée, Ovechkin a souvent dû porter seul l’attaque de son équipe, ciblé en priorité par les défenses adverses.

Rien de tout cela ne remet en cause la grandeur de Gretzky. Son total de points reste inégalé, notamment grâce à ses passes décisives, domaine dans lequel il surpasse tous les autres, même en cumulant leurs buts et passes. Mais si l’on considère uniquement les buts inscrits, Ovechkin a égalé puis dépassé le record dans les mêmes conditions de jeu que son illustre prédécesseur, ce qui confère à sa performance un caractère unique.

Aujourd’hui âgé de 39 ans, Ovechkin entame la dernière année de son contrat, qui pourrait aussi être la dernière de sa carrière. Il pourrait encore porter son total autour de 950 buts. Déjà champion de la Coupe Stanley, héros de toute une franchise, il n’a plus rien à prouver. Et même s’il décidait de prendre sa retraite à la fin de la saison, son record pourrait bien résister aux décennies à venir.

Rares sont les athlètes qui quittent la scène au sommet. On se souvient de Peyton Manning, couronné une dernière fois avec les Broncos, ou de David Robinson et Jerome Bettis, partis en beauté après un titre. Pour Ovechkin, battre le record « intouchable », décrocher une deuxième Coupe Stanley, puis s’éclipser, représenterait l’apogée parfaite d’une carrière exceptionnelle. Un dernier tour de magie pour l’un des plus grands buteurs que le monde du hockey ait jamais connus.